Types de côtes sur le littoral manchois

Le littoral du département de la Manche, fort d’un linéaire de 330km qui s’étend de la Baie du Mont-Saint-Michel jusqu’à la Baie des Veys, présente une très grande diversité de côtes. Cette richesse qui témoigne de processus côtiers souvent complexes, offre une pluralité de situations en terme de mobilité du trait de côte et de modes de gestion.

La Manche, un linéaire de côtes très diversifié

Le littoral du département de la Manche est en grande majorité constitué de côtes basses meubles appelées également côtes d’accumulation sédimentaires (71,4% du linéaire), à savoir des plages sableuses ou sablo-limoneuses (46,6%) et des espaces envasés : havres, baies et estuaires (24,8%).

En terme de dynamique sédimentaire, les côtes sableuses connaissent par alternance et parfois de façon rapide, des phases d’accrétion (progression du trait de côte par accumulation de sédiments) et d’érosion (recul du trait de côte) à diverses échelles de temps (tempête, saison ou variation du niveau marin).
Les baies, havres et estuaires ont pour leur part, une évolution naturelle qui tend vers un colmatage sédimentaire. Le littoral du département se caractérise également par la présence de côtes rocheuses et à falaises (15,2% du linéaire), qu’il s’agisse de côtes rocheuses hautes > 20m (9,3%) ou de côtes rocheuses moyennes et basses <20m (5,9%).
Peu élevées dans le sud Manche (60m à Carolles, 40m à Granville), les falaises gagnent progressivement de l’altitude vers le nord (89m à Flamanville, 129m au Nez de Jobourg).

Typologie du linéaire côtier et nature de l’estran du littoral manchois (©Département de la Manche)

A l’inverse des côtes meubles, le recul du trait de côte est irréversible pour les rivages à côtes rocheuses. Toutefois dans la Manche, les côtes rocheuses sont majoritairement constituées de matériaux très résistants (granite, gneiss…) et leur recul n’est pas perceptible à l’échelle humaine (quelques mm/an).

Les types de côtes dans la Manche, en Normandie et en France

Le littoral du département de la Manche est constitué de 15 % de côtes rocheuses et à falaises, de 72 % de côtes d’accumulation (sable, vases, galets) et de 13 % de côtes dites « artificialisées ».

Le littoral de la Région Normandie est constitué de 27 % de côtes rocheuses et à falaises, de 49 % de côtes d’accumulation (sable, vases, galets) et de 24 % de côtes dites « artificialisées ».

Le littoral de France métropolitaine, sur ses trois façades maritimes (Manche-Mer du Nord, Atlantique et Méditerranée), est constitué de 44 % de côtes rocheuses et à falaises, de 39 % de côtes d’accumulation (sable, vases, galets) et de 17 % de côtes dites « artificialisées ».

Les unités côtières du département de la Manche

La baie du Mont-Saint-Michel, dépression de 500 km² au fond du golfe normand-breton, présente un vaste estran sableux et des herbus à la confluence de trois fleuves : la Sée, la Sélune et le Couesnon. Alors que la côte bretonne est composée essentiellement de cordons coquilliers, polders cultivés et marais, la côte normande voit se succéder dunes, plages et enfin les falaises de Carolles et Champeaux qui ferment la baie au nord-est. La baie est marquée par une dynamique marine et des marées exceptionnelles (amplitude jusqu’à 15m), et par une dynamique du littoral terrestre, qui alterne entre érosion et ensablement.

La côte ouest du Cotentin, entre la baie du Mont-Saint-Michel et le cap de la Hague, se caractérise par de longues plages de sable et des massifs dunaires protégeant des zones basses arrière-littorales. Elle est entrecoupée par la présence de havres, et encadrée par des pointes et côtes rocheuses.
De part et d’autre du cap de Flamanville, on trouve les immenses massifs dunaires de Biville et d’Hatainville qui constituent les plus spectaculaires « dunes perchées » d’Europe. Depuis le cap de Carteret jusqu’à la pointe du Roc à Granville, la côte sableuse est entrecoupée par la présence de huit havres de tailles très différentes, avec du sud au nord, les havres de la Vanlée (300 ha), de Regnéville (870 ha), de Blainville (120 ha), de Geffosses (150 ha), de Lessay (580 ha), de Surville (70 ha), de Portbail (270 ha) et de Carteret (100 ha). La stabilité de l’ensemble est particulièrement vulnérable : les marées de forts coefficients et les épisodes de tempêtes y influencent fortement l’évolution du trait de côte.

La côte nord-ouest du Cotentin, qui correspond à la presqu’île de la Hague, est caractérisée par l’alternance de différentes formes de côtes : des côtes rocheuses à falaises abruptes, jalonnées de criques et ourlées de baies de galets ou de sable.

La côte nord-est du Cotentin, de la pointe du Brick à celle de la Hougue, présente une alternance de petites pointes rocheuses, encadrant des cordons de galets et de sable, eux-mêmes abritant des marais arrière-littoraux. On y distingue également la présence d’un large estran vaseux duquel émerge l’île de Tatihou et s’avance la pointe de la Hougue. Cette côte est particulièrement soumise à l’érosion marine et sensible à la montée du niveau de la mer.

La côte est du Cotentin, de Saint-Vaast-la-Hougue jusqu’à la baie des Veys, est marquée à nouveaux par de longues plages sableuses associées à de fins cordons sableux. Ce secteur est également marqué par la présence de falaises mortes, et une altimétrie particulièrement basse, rendant la côte vulnérable aux aléas côtiers et à la hausse du niveau marin, notamment dans les vastes secteurs poldérisés ou estuariens. La Baie des Veys (4700 ha), avec un marnage de l’ordre de 7m, est caractérisée par la présence d’herbus et vasières recouverts à chaque marée, mais aussi par des polders endigués.

Les havres : une spécificité morphologique de l’Ouest Cotentin

Les havres de la côte Ouest du Cotentin, entre le Cap Carteret et la Pointe du Roc de Granville, constituent une spécificité morphologique du littoral manchois.
Ces vastes estuaires se sont formés par la confrontation de houles en provenance essentiellement d’ouest, de l’accumulation de sédiments et de l’écoulement des cours d’eaux côtiers. Ils sont partiellement fermés par des flèches sableuses dont la présence et l’orientation dépendent de la dérive littorale.

Des milieux qui se comblent et se ferment

Tout comme les baies et les estuaires, les havres de l’Ouest Cotentin sont en cours de comblement.
Alors que l’accumulation de sables transportés dans les estuaires par les forts courants de marée et de houle contribue au développement de prés-salés qui y occupent de grandes surfaces, les débits des rivières dont ils sont l’embouchure, sont sans commune mesure avec leur étendue, et n’entrainent que peu de sédiments au large. Les apports continentaux y sont ainsi relativement faibles, et limités essentiellement à des particules fines, contribuant à la présence de bouchons vaseux et de vasières intertidales.
Les limites des havres sont en grande partie artificielles et la poldérisation par endiguement en a très souvent restreint les limites naturelles. Ainsi, les aménagements réalisés essentiellement depuis le XIXème siècle ont contribué à accélérer ce phénomène de colmatage, à limiter la mobilité des chenaux et à fermer totalement certains systèmes estuariens.

C’est le cas notamment du havre de Geffosses dont l’embouchure a été fermée en 1973 par l’aménagement d’une route-digue équipée de buses en partie basse, pour le passage de la départementale 650.

Vue aérienne du havre de Geffosses en 1947
Vue aérienne du havre de Geffosses en 2020

La plupart des havres englobent de vastes territoires arrière-littoraux situés sous les niveaux marins extrêmes et donc vulnérables aux aléas d’inondation par submersion marine ou débordement de cours d’eau. Les cordons dunaires à proximité de l’embouchure des havres et notamment les flèches sableuses, subissent une érosion rapide et les mobilités les plus importantes.

Avec le dérèglement climatique, ces phénomènes vont s’accélérer du fait de la modification des dynamiques d’érosion et de submersion marine, liées notamment à la montée du niveau marin.

En savoir +

Consultez l’application cartographique « Formes et géologie du littoral » développée par le Réseau d’observation du littoral de Normandie et des Hauts-de-France (ROL)