Travaux de l’observatoire : les indicateurs

Comprendre la mobilité du trait de côte et l’évolution morphodynamique des plages manchoises, supposent de transformer les importants jeux de données disponibles, que ce soit celles acquises lors des campagnes de suivi de l’observatoire départemental, ou celles mises à disposition par nos partenaires (ROL, DDTM, EPCI…) en indicateurs d’état côtier. Les traitements de ces bases de données à travers des indicateurs constituent des outils essentiels pour la gestion du littoral et une passerelle entre observations et prévisions d’évolution du trait de côte.

Indicateurs de suivi de l’évolution du littoral

Dans le cadre de la refonte en 2023 de l’observatoire départemental, une étude de l’évolution géomorphologique récente des plages et du trait de côte manchois a été réalisée, pour :

  • restructurer l’importante base de données morpho-sédimentaires acquises au cours des 30 dernières années
  • intégrer d’autres jeux de données produits par nos partenaires
  • actualiser et compléter les indicateurs de suivi de l’évolution du littoral pour améliorer la compréhension des processus morpho-sédimentaires
  • etc.

A l’issue de cette étude, cinq nouvelles catégories d’indicateurs d’état côtier vont être suivies à partir de 2023 :

  • des indicateurs « trait de côte »
  • des indicateurs « hauteur de sédiments »
  • un indicateur « volume de sable »
  • un indicateur « transport sédimentaire »
  • un indicateur « régime de tempête »
les anciens indicateurs (1991-2021)
  • la position du trait de côte
  • la hauteur de sable au niveau des bornes
  • l’évolution des volumes sableux par mètre linéaire, au droit de chaque profil
  • les vitesses annuelles de variation des paramètres suivis

Indicateurs « trait de côte »

En 2023, l’indicateur « trait de côte historique » a été recalculé sur les stations qui se situent devant un trait de côte naturel.

Après une analyse de sensibilité pour différents niveaux altimétriques, le choix a été fait de considérer comme trait de côte « historique », la projection altimétrique du niveau marin centennal (également désigné sous l’appellation « Tr 100ans »), qui correspond à un évènement de période de retour d’au moins 100 ans appelé évènement centennal, c’est-à-dire qui a une probabilité sur cent de se produire chaque année. Cette mise à jour de l’indicateur historique permet dans la grande majorité des cas de bien représenter les tendances évolutives de la position du trait de côte.

Cet indicateur « trait de côte historique » spécifique aux stations situées devant un trait de côte naturel, est également complété pour l’ensemble des stations (situées devant un trait de côte naturel ou un trait de côte fixé par un ouvrage), par le suivi de 3 autres niveaux marins de référence :

  • Le niveau de pleine mer de vive-eau (également désigné sous l’appellation « PMVE ») qui correspond au niveau pour un coefficient de marée de 95
  • le niveau de pleine mer de morte-eau (également désigné sous l’appellation « PMME ») qui correspond au niveau pour un coefficient de marée de 45
  • le niveau moyen de la mer (également désigné sous sous l’appellation « NM ») qui correspond à la position moyenne de la surface de la mer, constituant un niveau de référence considéré comme stable.

Ce travail d’intersection des profils de plage avec les niveaux de pleine mer de vive-eau (PMVE), de pleine mer de morte-eau (PMME) et du niveau moyen (NM) permet d’appréhender l’évolution de la largeur de plage sèche et de l’estran.

En fonction de l’avancée ou du recul de ces différents niveaux altimétriques, il est possible de déterminer si un profil de plage est dans un contexte d’érosion, de stabilité voire d’accrétion.

Le graphique ci-dessous permet d’aider à la compréhension de l’évolution de ces 4 indicateurs, dans le cas d’un trait de côte naturel :

Illustration de l’évolution des indicateurs planimétriques (source : Casagec)

Indicateurs « hauteur de sédiment »

En 2023, l’indicateur « hauteur de sable historique » au pied de la borne en bois située sur le haut estran a été recalculé sur l’ensemble des stations de mesures. Hormis certaines stations, où fautes de mesures topographiques anciennes, il n’a pas été possible de reconstruire l’ensemble de la chronique de cet indicateur, cette mise à jour de l’indicateur historique permet de très bien représenter les tendances évolutives des hauteurs de sable.

Cet indicateur « hauteur de sable historique » qui concerne l’ensemble des stations (situées devant un trait de côte naturel ou un trait de côte fixé par un ouvrage longitudinal), est également complété spécifiquement pour les stations situées devant un ouvrage côtier, par le suivi des hauteurs de sable par rapport à 3 distances :

  • à 10m de l’ouvrage
  • à 100m de l’ouvrage
  • à 200m de l’ouvrage

Ce travail d’intersection des profils de plage avec 3 distances par rapport à un ouvrage longitudinal, permet d’appréhender l’évolution de la hauteur de plage et ainsi d’évaluer les éventuels effets de cet ouvrage.

En fonction de l’élévation ou de l’abaissement de ces hauteurs de sable, il est possible de déterminer si un profil de plage est dans un contexte d’érosion, de stabilité voire d’accrétion.

Le graphique ci-dessous permet d’aider à la compréhension de l’évolution de ces 3 indicateurs, pour un trait de côte fixé par un ouvrage côtier longitudinal :

Illustration de l’évolution des indicateurs altimétriques (source : Casagec)

Indicateur « volume de sable »

L’indicateur « volume de sable » se traduit par le calcul de bilans sédimentaires :

  • sur l’ensemble de la façade manchoise, tous les 3 à 4 ans, à partir de l’exploitation des données LiDAR produites par l’Institut National Géographique (IGN) en 2012, et celles produites par le Réseau d’observation du littoral de Normandie et des Hauts-de-France (ROL) en 2016, 2020 et 2023.
  • sur les sites sensibles suivis par drone, 2 fois par an, à partir de l’exploitation des données photogrammétriques ou LiDAR produites par le Département de la Manche (13 sites), la Direction départementale des territoires et de la mer de la Manche (20 sites) et des sites ateliers suivis dans le cadre du projet MoCoManche par le Cnam-Intechmer (7 sites)

Les bilans sédimentaires sont définis dans des casiers de 100m de large et environ 200m de long, avec une prise en compte de la séparation « dune – estran ». L’exemple ci-dessous illustre le calcul de cet indicateur sur le secteur de Pirou-Plage.

Exemple de délimitation des casiers pour le calcul de l’IEC « volume de sable » sur le secteur de Pirou-Plage (source : Casagec)
Exemple de représentation cartographique des bilans sédimentaires sur le secteur de Pirou-Plage (source : Casagec)
Exemple de tableau de synthèse par casier des variations de volumes sédimentaire (source : Casagec)

Indicateur « transport sédimentaire »

Cet indicateur doit permettre de quantifier les forces motrices du transit sédimentaire et ainsi d’actualiser les calculs des transits sédimentaires de F. LEVOY et C.LARSONNEUR (Université de Caen) qui ont modélisé en 1993, les conditions hydrodynamiques au droit de la côte Ouest du Cotentin. La méthodologie de calcul repose sur :

  • l’étude des courants liés au déferlement des vagues et aux courants induits par la marée et les vents
  • la prise en compte des tendances d’évolution au cours des temps
  • l’estimation des flux au droit des 156 profils suivis dans le cadre de l’observatoire départemental
  • la calibration avec des observations de terrain
  • etc.

Cet indicateur se traduit par le calcul du transport moyen annuel (en m3/an) au droit de chaque station de suivi. L’exemple ci-dessous illustre le calcul de cet indicateur sur une partie du littoral du coutançais.

Exemple illustré du calcul du transport moyen annuel sur le littoral du Coutançais (source : Casagec)

Indicateur « régime de tempête »

L’indicateur « régime de tempête » doit permettre d’appréhender les évènements responsables des reculs brutaux des cordons dunaires.

La caractérisation des épisodes de tempêtes est ainsi basée sur la définition de seuils de hauteurs significatives des vagues (désigné sous l’appellation « Hs »), à partir desquels sont identifiées, classées et caractérisées les tempêtes ayant pu toucher le littoral.

Cette analyse sera mise en œuvre au droit des 156 stations et corrélée aux niveaux d’eau (marée astronomique + surcote) pour caractériser précisément l’impact des tempêtes.

Schéma de principe de la sélection des évènements de fortes houles (source : Nicolae Lerma et al., 2014).

L’exemple ci-dessous illustre la caractérisation du régime de tempête sur le secteur de Surtainville :

Nombre de tempêtes primaires : 1,7/an
– Hs pic : 4,40 m en moyenne (max : 6,02 m)
– Durée : 56 h en moyenne (max : 134 h)
– Durée cumulée des tempêtes secondaires (Hs > 2/5 Hs) : 385 heures/an

Rose de houle – Pointe nord-ouest du département de la Manche (source : Casagec)
Série temporelle des hauteurs significatives des vagues (Hs) sur la période 1994-2023, sur le secteur de Surtainville. Les droites en pointillés vert représentent les seuils de Hs. Les cercles rouges représentent le pic des périodes de tempêtes et leur taille est proportionnelle à la durée de l’événement. (source : Casagec)